Séminaire de Mécanique d'Orsay
Jeudi 9 juin à 14h au FAST
Fluides à seuil et interfaces
Philippe Coussot
Laboratoire Navier, Université Paris-Est
Un grand nombre de situations pratiques mettent en jeu l'interaction d'une pâte (fluide à seuil) et d'une surface solide : nettoyage (pâtes ou boues diverses) des outils de l'industrie alimentaire ou en agriculture, adhésion et lissage des matériaux cimentaires (mortiers, ciments) sur des murs ou des sols, application des gels, mousses ou crèmes cosmétiques ou pharmaceutiques sur la peau, etc. Divers phénomènes physiques peuvent être impliqués dans ces situations : écoulement, glissement aux parois, adhésion, tension interfaciale, etc.
On se concentre d'abord sur le problème du déplacement d'une masse de pâte le long d'une surface solide en l'absence d'autres effets que celui de l'écoulement du fluide. Pour cela on étudie le déplacement vertical d'une plaque rectangulaire à travers un bain de fluide à seuil. On montre que le fluide ne s'écoule que dans une petite épaisseur uniforme près de la plaque. Etonnamment, alors que le comportement apparent de cette couche, déduit des mesures de force en fonction de la vitesse, est celui du fluide, l'épaisseur de la couche cisaillée ne dépend que de la structure interne du fluide et non de ses paramètres rhéologiques.
On étudie ensuite la question de l'énergie de surface d'un fluide à seuil. Pour cela on commence par essayer de caractériser l'énergie d'adhésion à travers d'une expérience consistant à séparer, à vitesse très faible, un échantillon de pâte en deux parties (en écartant deux surfaces solides au contact du fluide). On montre que les dissipations visqueuses ne peuvent pas en général être négligées dans ce cas, et qu'un effet d'accrochage de la ligne de contact sur les surfaces solides tend à augmenter encore ces dissipations. Finalement pour répondre aux questions qui subsistent quant à la valeur de la tension de surface de ces fluides on propose une procédure originale inspirée de celle de Wilhelmy pour les liquides simples. Les premières mesures indiquent que la tension de surface d'un fluide à seuil n'est pas nécessairement celle du liquide interstitiel mais peut être affectée par ses caractéristiques structurelles.